Drumë avait en quelques jours pu visiter l'ensemble de l'île, du moins de façon superficielle. Et quelque chose avait retenu son attention. La longue plage de sable fin. Il avait eu envie d'y retourner. C'était la seule chose qui lui semblait familière dans cette île des bisounours. Le vent marin n'avait pas tout à fait l'odeur de chez lui, le sable n'avait pas exactement la même couleur, mais cela y ressemblait. C'était l'essentiel. Il avait trouvé un endroit où se ressourcer.
Il ôta ses chaussure de toile, et ses orteils allèrent s'enfoncer dans le sable, il jouait avec, le faisant glisser entre eux. Comme un enfant découvre cela pour la première fois, avec le même étonnement, le même plaisir. Il voulait apprendre à nouveau ces sensations. Oublier tout ce qui avait existé avant. Il devait tout reprendre à zéro. Oublier. Oublier tout. Mais plus il se disait cela plus ses souvenirs remontaient, plus il défilait devant ses yeux. Plus il sentait les émotions envahir son esprit. Il ne devait pas rester ici, en plein milieu de jeunes gens. Il devait s'éloigner de la foule.
Son regard ne cessait de scruter les individus sur la plage, la peur au ventre. Il devait s'éloigner et vite. Neutraliser son odeur. Neutraliser sa mutation. Instinctivement, il se déshabilla, laissant ses vêtements dans un coin isolé, et d'un pas rapide, il se dirigea vers l'eau. Il y serait sans doute en sûreté. L'eau canalisait sa mutation, la disperserait aux quatre vents. Ils sentaient quelques regards sur son corps. Avait-il déjà déclenché sa mutation ? Déjà ? Non... Il se pressa un peu plus pour atteindre l'eau. Quand son pied entra en contact avec l'eau, il ressentit un profond soulagement.
Bientôt son corps fut entièrement immergé. Il plongea la tête sous l'eau. Elle était fraîche et le sel lui brûlait les yeux. Mais qu'importait ? Il voulait juste être un peu libéré de sa malédiction. Il fit quelques mouvements pour s'éloigner de la plage, se mouvant de façon totalement fluide. Il avait toujours aimé nagé. Et la mer était une rivale revêche qui ne vous laissez pas reposer sur vos lauriers. Il adorait devoir se battre pour avancer. Même si ces derniers temps, c'était devenu un peu dur. Il y avait trop de choses à combattre. Trop de choses qui n'allaient plus dans son sens. Ici, il pouvait prévoir les vagues, lutter au bon moment. Mais dans la vraie vie ? Comment faire pour résoudre un à un les problèmes ? Tout semblait tellement simultané. Il avait l'impression d'être perdu dans sa propre vie. Lui qui avait toujours tout maîtrisé...
Il se laissa flotter à la surface. Puis, lentement, son corps remonta, se laissant porter à l'horizontale sur les flots. Il naviguait lentement, au rythme des vagues. Parfois, l'eau s'insinuait dans sa bouche ou ses narines, lui arrachant quelques quintes de toux. Mais au moins, il était bien. Au calme. Il aurait presque pu s'assoupir. Cependant, il y prenait garde. Il tenait malgré tout à la vie. Il voulait s'accrocher à elle. Et en ce moment, la solution était de se laisser porter, aller au fil de l'eau. Il ferma doucement les yeux. Il avait envie de pleurer. C'était étrange comme cette envie revenait régulièrement depuis ces jours-ci. Il détestait cela. C'était tellement pathétique. Le croûton avait raison, il était pathétique. Admettre que ce type avait raison était frustrant. Terriblement frustrant ! Cela lui donnait envie de casser la tête des gens à proximité ! Fort heureusement, il n'y avait personne à portée de main ! Il eut un soupir. Oublier tout ce qui l'entourait. Juste se souvenir de l'eau, des vagues, du calme d'une mer tranquille.
Son esprit se vida petit à petit. Ce que quand il allait atteindre le calme olympien qu'il sentit des mains sur son corps. Ce n'est qu'à ce moment là qu'il ouvrit les yeux et qu'il gifla la personne face à lui, surpris et apeuré.
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